mercredi 18 mai 2016

Qui sont les absents au Sénat ?

Depuis le mois de janvier, on nous dit qu'il n'y aurait que 14 sénateurs absentéistes. C'est en tout cas ce qu'a déclaré Gérard Larcher en annonçant à l'époque que ces 14 sénateurs se sont vus retenir 2100€, soit la moitié de l'indemnité parlementaire du dernier trimestre de l'année 2015. Mais depuis le début de l'année, impossible de savoir qui sont réellement ces 14 vilains petits canards. Ce devrait être chose réparée avec la sortie d'un livre sur le Sénat, mais qu'en est-il dans les faits ? L'hebdo Marianne, qui fait de la pub pour le livre d'Yvan Stéfanovitch, Le Sénat. Un paradis fiscal pour des parlementaires fantômes, indique que l'auteur a du enquêté 5 mois pour essayer de trouver les noms des 14 sénateurs sanctionnés.

Sur les 14 noms, je n'en citerai que 2 : Stéphane Ravier (sénateur-maire FN) et Gérard Collomb (sénateur-maire PS), même si Marianne et Yvan Stéfanovitch en cite 13 issus de tous les principaux  partis. Pourquoi ne citer que ces deux là ? Simplement car ce sont les seuls à reconnaître leur sanction. Les deux ont d'ailleurs la même excuse, leur agenda local fut particulièrement chargé, ce qui les a empêché, temporairement, d'exercer pleinement leur fonction de sénateur au sein du Palais du Luxembourg. C'est beau de voir l'extrême-droite et la gauche fournir le même excellent argument en faveur de la lutte contre le cumul des mandats. Bien sur qu'être un élu local est un boulot à plein temps et bien sur qu'être un sénateur est un boulot à plein temps. Dans ces deux postes d'élus, il y a des réunions, des assemblées obligatoires et un principe de représentation nécessaire. Difficile, voire impossible de cumuler ces deux agendas, ce qui montre l'utilité de la loi votée en 2014 et rendant impossible le rôle de parlementaire avec un poste d'élu local. Il sera intéressant de voir en 2018 quels sont les chiffres de l'absentéisme au Sénat et à l'Assemblée Nationale puisque le non cumul sera effectif en 2017.

En refusant de nommer les 14 sanctionnés, je ne peux que me poser des questions sur une transparence à deux vitesses. La première transparence pourrait s'appeler la transparence Closer. On annonce publiquement les biens des parlementaires et des ministres. Cette publication est certes utile pour suivre les risques d'enrichissement suspect d'un élu le long de sa carrière politique mais ressemble plus, pour le moment, à une fenêtre ouverte sur leur vie privée que sur la transparence de leur action politique. C'est surement le prix à payer pour arriver à plus de contrôle de la vie publique. En revanche en quoi l'anonymisation des sénateurs absentéistes aide à améliorer le contrôle de la vie publique. Les citoyens ne peuvent pas savoir si leurs élus font bien leur boulot, et quand un nouveau nombre de sénateurs abstentionnistes sera dévoilé, on ne pourra pas faire de comparaison pour voir si on a à faire à des récidivistes.

Mais plus que la question de l'identité des "sécheurs" du Sénat, la question du chiffre en lui-même doit être posée. N'y aurait-il vraiment que 14 sénateurs sur 348 qui seraient trop souvent absents ? D'après Marianne le compte est loin d'être bon et il semble facile d'être de leur avis. Les critères mis en place par le Sénat pour déterminer les abstentionnistes sont plus que laxistes. De plus il semble facile de se faire porter pale ou de se faire excuser. Les exemples donnés par Marianne ne me semblent pas les plus judicieux puisque l'hebdo indique que Jean-Vincent Placé évite la sanction d'une absence qui fut justifiée par le fait qu'il accompagnait le Président de la République dans un voyage officiel en Corée du Sud. Difficile d'en vouloir à l'élu écologiste. Au chapitre absent pour raisons médicales, le livre semble citer le sénateur de la Réunion Paul Vergès qui n'aura assisté à aucune réunion et aucun vote du Sénat car malade. Il faut dire que les grands électeurs Réunionnais ont élu un homme âgé aujourd'hui de 96 ans. On peut imaginer que des déplacements fréquents entre la métropole et l'Ile de la Réunion soit déconseillés.

L'initiative de sanctionner les absentéistes réguliers du Sénat est une bonne chose. Il est important à présent d'aller plus loin. Il faut que le Sénat nomme les punis afin que ces derniers ne puissent plus agir (ou ne pas agir dans ce cas) sans que leurs concitoyens ne le sachent. Il faut surement aussi rendre plus drastique les règles, même si l'on pense que le non cumul des mandats puisse résoudre une partie du problème de l'absentéisme. Il ne faudrait tout de même pas que nos nouveaux sénateurs deviennent plus paresseux que leurs prédécesseurs.

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