Il y a certaines situations politiques assez comiques, souvent grâce à des prises de positions de notre chère droite. Par exemple, un sujet revient régulièrement sur le tapis, le droit de vote pour les étrangers extra-communautaires. Aujourd'hui, ne peut voter aux élections nationales que les citoyens français et ne peuvent voter aux élections locales que les citoyens de l'Union Européenne. En résumé, les Canadiens, les Algériens ou les Chinois ne pourront voter en France même s'ils sont implantés depuis plusieurs années dans le pays.
Une des raisons de ce choix se résume dans les prises de positions de l'UMP qui avait le dernier mot ces dix dernières années. Par exemple en 2011, l'avocat Arno Klarsfeld expliquait que : "Les étrangers désireux de participer électoralement à la vie française ont le choix de la naturalisation. Voilà pourquoi je suis hostile au droit de vote des étrangers."
Peut-être plus crédible qu'un avocat - tête de liste people au élections locales, il nous faut écouter un ministre du gouvernement Sarkozy et proche de l'UDI, Hervé Morin : "Plutôt que d'accorder le droit de vote aux étrangers aux élections locales. D'abord et avant tout, il faut améliorer les conditions de naturalisation et qu'on n'ait pas des parcours du combattant incroyables pour celles et ceux qui veulent intégrer totalement la communauté nationale au point d'en acquérir la nationalité."
Ces déclarations sont confirmées par le principal parti d'opposition qui appelle à signer une pétition sur le sujet puisque "c'est contraire à notre tradition républicaine En France, le droit de vote est depuis toujours indissociable de la citoyenneté. C'est en accédant à la nationalité française qu'on accède au droit de vote."
J'avoue, deux des citations sont extraites de discours prononcés en 2011. Cela laisse le temps aux personnes citées de changer d'avis. Mais cela laisse surtout le temps aux opposants du droit de vote aux étrangers d'affuter leurs arguments et de changer d'avis.
Rappelons-nous 2011, la gauche est dans l'opposition, la LDH milite pour que tous les étrangers présents dans une commune depuis un certains nombre d'années aient le droit de choisir le représentant local. Comme l'ont montré les quelques citations précédentes (il y en a bien d'autres), la droite au pouvoir en 2011 a toujours préféré se retrancher derrière le prétexte de l'accès à la nationalité. En résumé, soit on accepte toute les règles françaises et celles de son pays d'origine, quitte à perdre officiellement une de ses nationalités, soit on reste définitivement un étranger qui n'a pas le droit de s'exprimer sur la tenue de sa commune (malgré les impôts locaux et taxes foncières que l'on peut débourser pour la mairie).
Etrangement, depuis le 6 mai 2012, le ministère de l'Intérieur a entendu les demandes des militants pro-vote pour tous (aux élections locales) et a entendu également les remarques des prédécesseurs au pouvoir. Résultat, aujourd'hui Manuel Valls annonce qu'il va revenir sur la politique d'immigration de son prédécesseur puisqu'il aurait fait preuve d’« un manque de transparence et de justesse dans l'appréciation » de l'accès à la nationalité.
Sans surprise, la droite s'offusque. Comment oser donner la nationalité française à ces étrangers qui vivent depuis plusieurs années sur le territoire français ? Bien sur, la meilleur réaction vient de notre Nadine Morano préférée qui n'hésite pas grâce à son compte Twitter d'exprimer la plus vive réticence à voir des étrangers être naturalisé.
Comme il fallait le prévoir, voici le véritable visage de la droite. Il est facile de refuser le droit de vote à des personnes qui vivent dans la même commune depuis des dizaines d'années en se cachant sous un faux prétexte. La position est moins tenable quand on vous explique que dans ce cas, commençons par naturaliser ceux qui le souhaitent (quitte à ce qu'ils perdent leur nationalité d'origine).
En revanche, quelle crédibilité accorder à ces hommes et ces femmes politiques qui réclament la naturalisation des étrangers quand ils sont au pouvoir et qui fustigent cette même naturalisation quand ils sont dans l'opposition ?
Je suis un fervent défenseur du droit de vote des étrangers à condition qu'ils aient vécu assez longtemps sur le territoire français, je peux comprendre qu'il soit plus simple de naturaliser les plus anciens habitants étrangers que de donner le droit de vote à tous les étrangers vivant en France depuis un certains temps. En revanche, il faut être un minimum cohérent et arrêter de s'offusquer alors qu'un gouvernement suit les recommandations de plusieurs membres de l'ancien gouvernement.
Madame Morano, Monsieur Morin et bien d'autres, soyez honnêtes, annoncez que vous ne voulez pas accorder le droit de vote aux étrangers et encore moins s'ils présentent la moindre singularité avec vos traditions.
Ce n'est pas être communautaire que de vouloir écouter toutes les opinions d'une ville ou d'un département, ce n'est pas être anti-patriote que de vouloir écouter son voisin étranger, en revanche c'est d'être de mauvaise foi que de refuser d'accepter la réalité, que de refuser d'accepter la seule solution prononcée par vous durant les 5 précédentes années.
Vous avez gagné pour ne pas augmenter le nombre d'électeurs aux municipales 2014. Mais qu'est ce qu'une élection devant la liberté d'expression des citoyens étrangers dans les années à venir ? Pour une élection municipale 2014 toujours restreinte, combien d'élections futures ouvertes à tous les résidents des communes et territoires de France ?
Ouvrir la naturalisation comme le propose Manuel Valls est une mesure juste. Elle n'est pas suffisante, mais elle va au moins dans la même direction que ce que proposait l'ancien gouvernement. Il est donc nécessaire de les écouter expliquer qu'il est scandaleux de naturaliser des étrangers alors qu'il s'agissait de la seule solution possible annoncée...