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mardi 6 janvier 2015

Entendu sur Inter: Pénibilité et formation sont des choix de gauche

Cliché emprunté sur le site de l’Élysée
Hier matin, François Hollande était durant deux heures invité à l’une des matinales radios les plus écoutées de France. Il n’était pas là pour sortir de nouvelles annonces. Ça peut décevoir certains analystes politiques ou éditorialistes encore accroc à l’ancien président et son rythme d’une apparition = une loi. Principe sympathique quand il faut meubler des heures d’antennes sur les chaines d’infos mais qui rend vite illisible l’action gouvernementale puisque ce rythme ne permet pas de revenir sur ce qui a été fait, sur ce qui a été voté ou sur ce qui entre en application. C’est pourtant sur ce dernier point que le bas blesse. S’il est facile d’annoncer un projet de loi, si cela prend un peu plus de temps pour en débattre, l’amender, le faire voter, cela peut prendre énormément de temps avant de le rendre applicable. Il suffit de se rappeler des portiques écotaxes, dont la mise en application a été déléguée au gouvernement suivant avec la réussite que l’on connait.

Donc hier, François Hollande était là, énergique, pour défendre l’action gouvernementale. Puisque le PS est à la limite de l’inaudible pour faire la retape des mesures prises par le gouvernement, puisque les ministres font le boulot mais ne peuvent pas être partout à la fois, c’est le Président de la République lui-même qui a retroussé les manches et a fait le boulot. Du coup, quand on lui demande ce qu’il pense de sa première moitié de quinquennat, quand on le titille sur le fait que sa politique serait de droite car 2 députés de l’UMP se sont ouvertement prononcés pour le projet de loi Macron, François s’est défendu, à juste titre, en rappelant deux mesures de gauche en vigueur depuis le début de l’année 2015.

En vigueur depuis le 1er janvier, « le compte pénibilité va permettre à ceux qui travaillent la nuit, aux 3-8, d'avoir des formations supplémentaires ou de partir plus tôt à la retraite ». « Il ne s'agit pas que ce soit inapplicable. Il faut que ce soit simple. Et avec les partenaires sociaux, je m’y engage. » Et il enchaîne, « depuis le 1er janvier s'applique la réforme du compte personnel de formation », « insister sur la formation professionnelle, c'est un choix de gauche. »

Voilà deux exemples qui se faisaient attendre. Une prise en compte correcte de la pénibilité était attendue depuis la réforme des retraites de 2003 (menée par François Fillon). Il aura fallu attendre 10 ans exactement pour lui donner une existence légale et près de 12 ans pour la voir s’appliquer réellement ! A partir de janvier 2015, gagneront des points de pénibilité toutes personnes réalisant :

  • plus de 120 nuits travaillées par an ou plus de 50 nuits en travaillant aux 3-8,
  • plus de 900 heures de travail répétitif
  • ou plus de 600 interventions sous-marines (minimum 1 200 hectopascals pour ceux qui contrairement à moi connaissent)
En 2016, seront également prises en compte la manutention de charges lourdes, les postures pénibles, les vibrations mécaniques, les agents chimiques, les températures extrêmes et le bruit.
Oui le MEDEF râle sur le sujet, oui les petites entreprises craignent une surcharge de documents administratifs alors qu’en parallèle un choc de simplification administrative est en cours, mais le compte pénibilité est aujourd’hui en route et c’est un véritable progrès de gauche. Surtout que ce compte pénibilité n’a pas pour vocation de partir plutôt à la retraite avec un physique cassé de partout mais plutôt d’empêcher les carrières longues sur ce genre de postes en obligeant qu’un minimum des points de pénibilité reçu soit utilisé dans la formation.

La formation tout au long de la vie, autre mesure et autre combat de gauche historique. L’accès à l’école pour tous est un acquis historique indéniable, mais ce n’est pas une raison pour oublier ceux qui n’ont pas réussi étant jeune ou qui n’ont pas eu la chance ou la réussite de trouver leur voie du premier coup. Comme ce n’est pas une raison de laisser de côté tous ceux dont le domaine d’activité n’est plus aussi porteur qu’avant (voire n’existe plus). D’où l’importance de permettre l’accès à une formation décente et utile tout au long de sa vie. C’est une revendication de gauche, c’est une revendication syndicale (c’est un des combats historique de la CFDT). Depuis le 1er janvier, le compte personnel de formation (CPF) existe. Mieux, depuis hier, lundi 5 janvier, chacun peut se rendre sur http://www.moncompteformation.gouv.fr pour initialiser son propre compte, y renseigner son nombre d’heures de DIF (droit individuel à la formation) potentiellement gagnées et regarder les formations proposées.  Gros avantage du nouveau système par rapport au feu DIF, ce compte formation n’est plus lié à un employeur mais est lié à nous, employé. Tant que l’on travaille, on économise des heures de formations. Si l’on change d’employeur ou si l’on se retrouver au chômage, même pour une très longue durée, on garde le nombre d’heures acquis.
Grande nouveauté pour les chômeurs, plus besoin de l’accord de Pôle Emploi pour réaliser une formation à partir des heures de CPF. Pour le salarié, si celui-ci trouve une formation en dehors de ses heures de travail, il peut lui aussi utiliser ses heures de CPF sans l’accord de son employeur. En résumé, si j’ai envie de suivre des cours du soir pour devenir apiculteur, je n’ai pas à prévenir mon employeur. Du coup ce dernier ne peut n’y m’empêcher de devenir restaurateur, ni me prendre en grippe car au courant que je veux me réorienter.

Hier matin, au réveil, ça m’a mis de bonne humeur d’entendre François Hollande rappeler aux frondeurs du PS, aux soi-disant dépositaires de la vraie gauche, aux écologistes en mal de visibilité et surtout à tous les auditeurs, que son gouvernement fait des choix de gauche en insistant sur ces deux points. Certes tout n’est pas parfait, mais comme le disait François Hollande à propose des critiques de l’opposition : « La droite dit qu'il faudrait aller plus loin mais pourquoi ne l'ont-ils pas fait ? ». Prenons les progrès un par un, ça nous fera toujours plus de progrès engrangés qu’avec les deux gouvernements précédents.

dimanche 2 novembre 2014

Un jour, une action - la sécurisation de l'emploi

Deuxième épisode de la série "Un jour, une action" qui a pour objectif de revenir quotidiennement sur le bilan à mi-mandat de François Hollande jusqu'au 6 novembre, jour anniversaire des 30 mois de son élection à la tête de la France.

Nous sommes dimanche et ce billet ne célèbrera pas le travail dominical tant réclamé par certains directeurs d'enseignes commerciales. Mais je resterais dans le domaine de l'emploi avec la loi pour la sécurisation de l'emploi. Cette loi est surement un des premiers éléments perturbateurs dans l'osmose à gauche pourtant elle restera à plus d'un titre un marqueur du quinquennat de François Hollande. Cette loi de sécurisation de l'emploi a une histoire particulière. C'est la première loi issue du dialogue social promis par François Hollande. Pour construire le texte à l'origine du projet de loi, toutes les organisations patronales et les organisations syndicales considérées comme représentatives du fait de leurs résultats aux élections professionnelles se sont retrouvées autour d'une table. Au bout du processus, trois organisations patronales et trois organisations syndicales représentant plus de 50% des salariés sont arrivées à un accord. François Hollande l'avait promis, si un accord est trouvé alors il sera retranscrit dans la loi sinon ce sera au gouvernement d'écrire le projet de loi. C'est donc une mini-révolution dans la méthode de travailler qui a aboutit au premier grand texte de loi du quinquennat sur l'organisation du travail.

Que propose cette loi de sécurisation du travail. Tout d'abord de garantir une protection sociale à tous les salariés en rendant obligatoire les complémentaires santé. Non que l'Etat ne veuille se débarrasser de sa mission sociale avec la Sécurité Sociale mais cela traduit la volonté que tous les employés, quelle que soit la taille de leur entreprise, puisse bénéficier d'une complémentaire plus qu'utile dès que l'on a à traiter des soins dentaires, des corrections optiques ou des arrêts pour hospitalisation.

Ensuite, la loi met en avant le besoin de garantir un accès à la formation tout au long de la vie. En créant un compte formation qui suit le salarié durant toute sa vie active et non pas uniquement durant sa présence dans une entreprise particulière, la loi permet aux salariés d'être mieux armés en cas de licenciements ou en cas de volonté de changer de métier puisque leurs heures de formations personnelles et individuelles ne peuvent plus disparaître quand le salarié quitte son entreprise.

Pour lutter contre l'emploi précaire, les CDD très courts sont surtaxés. Les emplois à temps partiel voient leur durée minimale de temps de travail augmenter pour passer à 24 heures hebdomadaires. Dans le même ordre d'idée, les heures supplémentaires des contrats à temps partiel seront payées dès la première heure.

Comme dit en préambule, cette loi a provoqué du tumulte à gauche, au sein du PS, au sein des différents partis politiques de gauche (le Front de Gauche a rapidement organisé des manifestations sur le sujet) et surtout au sein des organisations syndicales. Le processus mis en oeuvre a pourtant le mérite de mettre au coeur de la politique du travail et de l'emploi les organisations syndicales. Ces dernières se sont retrouvées sous les projecteurs, non pas car elles organisaient des blocages mais car elles étaient au travail pour trouver des solutions aux problèmes et aux craintes des Français. La méthode a une nouvelle fois montré que certaines organisations comme la CFDT ont l'envie d'avancer, de progresser. Comme beaucoup de formations progressistes, la CFDT n'a pas cru que tout pourrait se changer lors d'un grand soir mais qu'il fallait savoir faire des compromis à partir du moment qu'un certains nombre de progrès étaient acquis lors des discussions. Le gouvernement n'a pas fait l'affront aux organisations signataires de l'accord de détricoter le texte signé, montrant ainsi le plus grand respect au dialogue. 

Cette loi pour la sécurisation de l'emploi est une réussite dans sa façon d'être conçue. En tant que pionnière du genre, elle a permis de poser les premières bases du dialogue social que François Hollande souhaite faire entrer dans la constitution comme norme pour les futures lois sur le monde du travail.

Rendez-vous demain pour un nouveau jour, une nouvelle action.

lundi 15 septembre 2014

Gattaz, tu pousses le bouchon un peu trop loin

Pierre Gattaz est le patron des patrons qui aimerait faire de la politique. Sous prétexte d’avoir été élu avec 476 voix sur 484 électeurs du MEDEF, Gattaz se croit à même à donner son avis sur la gestion de la France. Après tout, il est un acteur du dialogue social, il est donc dans son droit de s’exprimer, tout comme Thierry Lepaon pour la CGT, Laurent Berger pour la CFDT, Jean-Claude Mailly pour FO, Philippe Louis pour la CFTC ou encore Carole Couvert pour la CFE-CGC. Bref, Pierre Gattaz n’est qu’un interlocuteur qui se veut plus puissant que les autres.

Se disant plus puissant, nous pourrions nous attendre à avoir à faire à une personne avec une ligne directrice et des propositions argumentées et surtout stables. C’est souvent ce qui est conseillé pour avoir plus de lisibilités dans les propositions et les actes. Mais Pierre Gattaz ne semble pas de ce genre. Pour faire de viles généralités, il est comme tout bon patron qui se respecte, beaucoup de blablas pour faire plaisir à ses interlocuteurs subalternes mais pas beaucoup de cohérence entre ses différentes interventions. L’important pour le patron des patrons, c’est d’avoir un objectif simple, qui parle aux gens, peu importe le détail et la manière.Au final, ce sont rien de moins que trois plans de création d'emplois que Pierre Gattaz s'est amusé à détaillé au fil des mois.

Il y a un an, le 10 octobre 2013, Pierre Gattaz promettait déjà la création d’un million d’emplois sur 5 ans. Pour cela, il demandait au gouvernement de les aider à réussir ce projet en revoyant les « conditions fiscales, sociales et réglementaires ». Pour aller dans ce sens, le gouvernement, en plus du CICE mis en place quelques mois plus tôt, a créé le Pacte de Responsabilité et de Solidarité.

En février 2014, Pierre Gattaz annonçait 10 mesures pour le MEDEF afin de créer un million d’emplois. Pour cela il prévoyait :

  • « D’enrichir le terreau entrepreneurial » en communiquant auprès de ses adhérents de l’utilité et de la pertinence du mécénat de compétence,
  • « D’être mieux formé et accompagné pour mieux entreprendre et reprendre » en étant vigilant que la réforme de la réforme de la formation professionnelle intègre des formations à la création et à la reprise d’entreprise. Il s’engage aussi à lancer un programme de formation intrapreneuriale et de lancer une expérimentation en direction des étudiants porteurs de projets entrepreneuriaux.
  • « D’être mieux accompagné pour mieux entreprendre et reprendre… au féminin » en s’engageant à la sensibilisation des réseaux d’accompagnement et aux spécificités de l’entrepreneuriat féminin.
  • « D’être mieux accompagné pour mieux entreprendre et reprendre… dans les quartier » en lançant un concours national auprès des jeunes souhaitant créer une activité dans des quartiers de politique de la ville.
  • De « Diffuser l’envie d’entreprendre » en lançant avec le Ministère de la Défense une opération de parrainage de militaires par entrepreneurs afin de les accompagner dans leur démarche de reconversion entrepreneuriale.
  • De « nous rendre tous acteurs de l’entrepreneuriat » en sensibilisant les adhérents du MEDEF aux enjeux du financement de l’amorçage par le crowdfunding.

Et aujourd’hui, 15 septembre 2014, le MEDEF par la bouche de Pierre Gattaz propose de nouvelles idées pour créer un million d’emplois. Cette fois-ci on retrouve un mélange entre le programme thatchérien de François Fillon, les idées anti-repos que Jean-Pierre Raffarin a commencé en son temps à mettre en place. La nouvelle sortie de Pierre Gattaz contient :

  • La suppression de 2 jours fériés contre la création de 100 000 emplois
  • Permettre de rémunérer des employés à un salaire inférieur au SMIC pour gagner entre 50 000 et 100 000 emplois
  • Lisser les seuils sociaux (pour les obligations sociales comme fiscales) pour créer entre 50 000 et 100 000 emplois.
  • Mettre fin à une durée hebdomadaire du temps de travail
  • Autoriser le travail le dimanche et en soirée pour créer entre 90 000 et 300 000 emplois,
  • Créer un contrat de projet comme généralisation du contrat de chantier existant aujourd’hui
  • Et pour finir un baisse des charges et la fin de certaines taxes.

En 1 an, Pierre Gattaz nous a proposé 3 plans différents pour créer 1 million d’emplois. En juillet 2014, la France comptait 5 386 600 chômeurs toutes catégories confondues. J’imagine donc qu’en suivant toutes les recommandations du MEDEF, ce chiffre diminuerait de 3 millions pour atteindre un seuil enviable de 2 386 600 chômeurs toutes catégories. Autre possibilité, Pierre Gattaz arrête de nous saouler tous les 6 mois avec un nouveau plan de création d’un million d’emplois et nous fait un bilan des actions prises par les entreprises depuis 2012 pour créer des emplois avec l’aide du CICE, du pacte de responsabilité et des engagements du MEDEF… Aujourd’hui aucun résultat n’est visible, à croire que ce n’est pas la confiance du gouvernement qui devrait être mise en doute cette semaine mais la confiance dans le patronat qui se moque ouvertement de tous les Français.

mardi 8 juillet 2014

Dans dialogue social, il y a dialogue #CGS2014

La Grande Conférence Sociale 2014 est lancée. Rapidement les journalistes se sont demandés s'il ne fallait pas requalifier l'événement en Conférence Sociale puisque sa grandeur se trouve limité par le boycott de certains.

La CGT et FO après discussions internes ont décidé de boycotté le deuxième jour de la conférence, histoire d'être présent pour échanger avec le Président de la République mais non pour parler boulot avec les représentants du patronat ou pour écouter le Premier Ministre. On peut comprendre la colère de la CGT et de FO. Depuis 2012 ils sont marginalisés lors de la signature des principaux accords, le refus de signer n'empêchant pas la réalisation des accords, la faute à une représentativité syndicale les empêchant tout blocage. Depuis 2012, sans leur assentiment, le nombre d'heures minimum dans un contrat à temps partiel a été relevé à 24h, un compte personnel de formation a été créé pour suivre toute la vie active d'une personne et non plus sa présence sans une entreprise, un compte pénibilité est (difficilement) en train de se mettre en place, bref le monde évolue sans leur accord.

Pourquoi boycotter la nouvelle Conférence Sociale ? Est-ce à cause de ces progrès, tous évoqués lors des précédentes conférences sociales ? Est-ce à cause du bras de fer perdu contre la réunification de la SNCF et de RFF ? Est-ce à cause de la nouvelle convention d'assurance chômage, signée par FO, CFDT et CFTC, mais qui a mis le feu chez les intermittents (alors que le gouvernement veut revenir sur les chapitres spécifiques au statut des intermittents) ?

Toujours est-il que dans "dialogue social", il y a le terme dialogue. On peut ne pas être en accord avec les exigences du MEDEF, j'ai même tendance à penser que l'on doit être en désaccord avec ces exigences. On peut être en désaccord avec la façon d'agir de Manuel Valls face aux caprices du MEDEF. Mais comment ces désaccords peuvent être un motif de non discussion sur des sujets tels que le retour à l'emploi pour les chômeurs de longue durée ou l'offre d'apprentissage pour les jeunes ? Notre pays compte 5 millions de chômeurs et certaines organisations syndicales préfèrent laisser une chaise vide plutôt que de défendre leur point de vue ? N'ont-ils rien à proposer pour ces gens ? N'ont-ils rien à faire de ces personnes qui n'entrent pas dans les cases de leurs fédérations par secteur d'activité ?

En 2012, seules la CGT, la FSU et Solidaires (dont fait parti SUD) ont appelé à battre Nicolas Sarkozy. Cette volonté de barrage s'expliquait par une volonté de retrouver un dialogue social et donc en finir avec des réformes inventées par le gouvernement sous l'influence d'on ne sait qui et imposées sans la moindre concertation. François Hollande a voulu mettre fin à cette pratique et s'y tient en convoquant une 3ème Grande Conférence Sociale en 3 ans, seul moment où organisations patronales, organisations syndicales et gouvernement se retrouvent autour d'une table pour définir l'agenda et le cadre des réformes à venir.

Comment réclamer plus de dialogue en refusant de participer à ce dialogue. Pour discuter, il faut être plusieurs à pouvoir s'exprimer, mais il faut aussi que ceux qui s'expriment sachent écouter les autres. Impossible de réaliser cela sans daigner s'assoir à la table des discussions. En boycottant la 3ème Conférence Sociale, la CGT et FO donnent raison à l'UMP sarkozyste qui considère comme une perte de temps la consultation des partenaires sociaux.

mardi 15 avril 2014

Edouard Balladur sort de ces corps

La sortie de Pascal Lamy sur le SMIC il y a 2 semaines ne m’a pas affolé plus que cela. A vrai dire, je l’ai même trouvé un peu mou sur cette histoire. Je m’attendais de l’ancien patron de l’OMC un peu plus de cran, de toupet. Quand on a dirigé une organisation mondiale prônant le libre-échange sans jamais vraiment se soucier des conditions de travail pendant 8 ans, on ne peut qu’être déçu de n’entendre une volonté que d’un SMIC au rabais alors qu’il aurait pu réclamer un l’abrogation pur et simple du SMIC.
Pour Pascal Lamy, il faudrait « aller davantage vers de la flexibilité et vers des boulots qui ne sont pas forcément payés au Smic ». Heureusement qu’il a précisé qu’il était esseulé dans sa famille socialiste sur cette question.

Pascal Lamy peut être rassuré, il n’est pas seul. Intrigué par ce concept hallucinant de proposer plus de misère à ceux qui y sont déjà, François Hollande a déjeuné avec 3 autres économistes qui veulent libérer « la France prisonnière d'un vieux logiciel de pensée ». C’est Seb Musset qui se « réjouit » de la nouvelle (et il a bien raison). Rassurons-nous en se disant que si François Hollande est un homme de synthèse, il n’est pas encore une éponge qui fait sienne toutes les idées à la con qu’il peut entendre dans les diners. N’ayant pas lu l’ouvrage des ces 3 économistes qui ne connaissent surement du SMIC que les déductions de cotisations qu’il offre à une entreprise et non les difficultés qu’il procure à ceux qui en sont bénéficiaire pour vivre correctement au quotidien avec, je me dis qu’ils ont surement d’autres idées et pourquoi pas une ou deux intéressantes. Ou pas…

Pour compléter le Club des 5, notre cher Pierre Gattaz a décidé de les rejoindre aujourd’hui aussi. Il est pour l’instauration d’un SMIC réduit pour les jeunes afin de les aider à trouver un travail. Son explication est belle : "Il vaut mieux quelqu'un qui travaille dans l'entreprise avec un salaire un peu moins élevé que le Smic, de façon temporaire et transitoire, plutôt que de le laisser au chômage." Mais oui Pierre, un jeune, c’est frais, c’est con, c’est malléable, offrons lui des salaires au rabais ! Ce jeune a été éduqué à coup de contrats pro, d’alternances, de stages, que des jobs sous-payés pour effectuer une charge de travail proche d’un véritable emploi. Alors ces jeunes ne pourront qu’être heureux de trouver un nouveau job, légèrement mieux payé que leur précédent stage ou leur dernier contrat pro, même si la rémunération n’atteint toujours pas le SMIC.
« Jeune et con » n’est qu’une chanson, pas une réalité. Le Jeune n’a pour envie que d’entrer de plein pied dans la vie active, avoir un logement, sortir entre amis, fonder une famille, avoir une voiture, partir en voyage, que sais-je encore. Le Jeune n’a pas envie d’attendre 67 ans et son départ en retraite pour profiter de sa jeunesse. Pour relancer l’économie, il vaut mieux protéger les jeunes plutôt que les appauvrir. Il vaut mieux leur permettre de rentrer de plein pied dans la vie active plutôt que de les considérer de plus en plus longtemps comme des sous-travailleurs qui sont aptes à travailler comme leurs collègues mais qui ne méritent pas le même salaire.

C’est Edouard Balladur qui doit être heureux. Qui aurait cru que le SMIC Jeune reviendrait à la mode pour le 20ème anniversaire de sa mort (suspendu le 30 mars 1994 et abrogé le 8 août de la même année) ? Je pensais que seul Sarkozy avait survécu au Balladurisme. A première vue, il commence à voir des héritiers apparaître. Je ne me souviens que de deux idées d’Edouard Balladur, le SMIC jeune et le financement de sa campagne présidentielle à coup de vente de t-shirts. Les héritiers de Balladur, c’est ça votre prochaine idée pour relancer l’économie française ?

mercredi 26 février 2014

Encadrer les stages pour aider la jeunesse

Génération Précaire va devoir trouver un vrai slogan
La mode des stages n'est pas prête de prendre fin, ce n'est d'ailleurs pas l'objectif de la loi tendant au développement, à l'encadrement des stages et à l'amélioration du statut des stagiaires votée dans la nuit de lundi à mardi à l'Assemblée Nationale. Pourtant cette loi est porteuse de nombreuses avancées qui seront utiles aux futurs stagiaires et aussi aux chercheurs d'emploi. En effet, les stages sont utiles et bénéfiques à de nombreux jeunes, c'est pourquoi toutes les écoles supérieures et les universités demandent à leurs étudiants de réaliser différentes périodes de stages durant leur cursus. 

Si une entreprise est légalement obligée à payer tout stagiaire qui effectue un "stage dans un même organisme d'accueil de plus de 2 mois, consécutifs ou non, au cours de la même année scolaire ou universitaire", elle a le droit de ne payer ce stagiaire qu'en respectant un minimum de 12,5% du plafond horaire de la Sécurité Sociale. Une entreprise peut donc payer un stagiaire 436,05€ pour un mois de travail à temps plein, soit 3 fois moins qu'un smicard ! Il est donc nécessaire d'encadrer toujours un peu plus l'utilisation des stages en entreprises pour empêcher des entreprises de remplacer de véritables emplois par des stages. Il est donc heureux de lire dans la nouvelle loi :
Art. L. 124-7. – Aucune convention de stage ne peut être conclue pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent, pour faire face à un accroissement temporaire de l’activité de l’organisme d’accueil, pour occuper un emploi saisonnier ou pour remplacer un salarié en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail.
Art. L. 124-8. – Le nombre de stagiaires dont la convention de stage est en cours sur une même semaine civile dans l’organisme d’accueil ne peut pas être supérieur à un nombre fixé par décret en Conseil d’État.

La nouvelle loi cherche également à mieux encadrer les stagiaires par des représentants de leur établissement scolaire. Depuis la précédente réforme su statut du stagiaire datant de 2006, une convention de stage est obligatoire pour obtenir un stage afin d'interdire les stages hors cursus universitaire. Pour palier cette contrainte, certaines "écoles" (qui n'ont d'école que le terme inscrit sur une plaque) proposent la vente de conventions de stage, comme par exemple à la "Central Business Langage Education (CBLE)" située dans le 4ème arrondissement de Paris qui propose des sésames pour 580€. C'est assez cher payé, surtout si l'on est payé 436€ par mois... Pour essayer de contrer cette pratique (je dis bien essayé car il y aura toujours des personnes pour se faire de l'argent sur la précarité), la loi précise : 
Art. L. 124-2. – L’établissement d’enseignement est chargé :
1° D’appuyer et d’accompagner les élèves ou les étudiants dans leur recherche de périodes de formation en milieu professionnel ou de stages correspondant à leur cursus et à leurs aspirations et de favoriser un égal accès des élèves et des étudiants, respectivement aux périodes de formation en milieu professionnel et aux stages ;
2° De définir dans la convention, en lien avec l’organisme d’accueil et le stagiaire, les compétences à acquérir ou à développer au cours de la période de formation en milieu professionnel ou du stage et la manière dont ce temps s’inscrit dans le cursus de formation ;
3° De désigner un enseignant référent au sein des équipes pédagogiques de l’établissement qui s’assure du bon déroulé de la période de formation en milieu professionnel ou du stage et du respect des stipulations de la convention mentionnées à l’article L. 124-1. Le nombre de stagiaires suivis simultanément par un même enseignant référent et les modalités de ce suivi régulier sont fixés par décret
;
Le stagiaire devra donc être suivi par un enseignant référent qui ne pourra suivre qu'un nombre restreint de stagiaires. Ceux qui ont été stagiaires savent que s'ils voient leur référent une fois durant leur stage, c'est déjà beaucoup. On peut espérer que le suivi sera meilleur ainsi. Au moins, si le stage se passe mal, ce qui peut mettre en difficulté le stagiaire dans la recherche d'un emploi futur, le stagiaire pourra se retourner vers son enseignant référent. Il aura la loi avec lui. Mais le plus important pour le stagiaire, c'est d'être bien encadré dans l'entreprise où il est plus que d'être suivi par un enseignant. Il y a aussi un article de loi pour ça:
Art. L. 124-10. – Un tuteur de stage ne peut pas être désigné si, à la date de la conclusion de la convention, il est par ailleurs désigné en cette qualité dans un nombre de conventions prenant fin au delà de la semaine civile en cours supérieur à un nombre fixé par décret en Conseil d’État.

Dans le cadre de son stage, le stagiaire, s'il ne doit pas remplir une mission correspondant à un véritable emploi. Pourtant il aura le droit, dès que son stage dépasse les 2 mois, à une protection similaire aux employés, dont la principale mesure est liée à la parentalité:
Art. L. 124-13. – En cas de grossesse, de paternité ou d’adoption, le stagiaire bénéficie de congés et d’autorisations d’absence d’une durée équivalente à celles prévues pour les salariés aux articles L. 1225-16 à L. 1225-28, L. 1225-35, L. 1225-37 et L. 1225-46 du code du travail
Mais également, il ne doit pas effectuer un stage dangereux pour sa santé :
« Il est interdit de confier au stagiaire des tâches dangereuses pour sa santé ou sa sécurité.

Il est bien d'essayer de protéger le stagiaire contre les abus, mais qu'est-il prévu pour dissuader réellement l'entreprise de ne pas mal employer ses stagiaires ? Elle risque des amendes dont le montant est quatre fois plus élevé que la rémunération d'un stagiaire. 
Art. L. 124-17. – La méconnaissance des articles L. 124-8 et L. 124-14 est constatée par les agents de contrôle de l’inspection du travail mentionnés aux articles L. 8112-1 et L. 8112-5 du code du travail.
Les manquements sont passibles d’une amende administrative prononcée par l’autorité administrative.
Le montant de l’amende est d’au plus 2 000 € par stagiaire concerné par le manquement et d’au plus 4 000 € en cas de réitération dans un délai d’un an à compter du jour de la notification de la première amende.
Le délai de prescription de l’action de l’administration pour la sanction du manquement par une amende administrative est de deux années révolues à compter du jour où le manquement a été commis.
L’amende est recouvrée comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine
.
Et si un employé souhaite contester devant les prudhommes la qualification de son stage pour le requalifier en contrat de travail, alors les prudhommes auront un mois maximum pour statuer sur le sujet :
Art. L. 1454-5. – Lorsque le conseil de prudhommes est saisi d’une demande de requalification en contrat de travail d’une période de formation en milieu professionnel ou d’un stage mentionnés à l’article L. 124-1 du code de l’éducation, l’affaire est directement portée devant le bureau de jugement qui statue au fond dans un délai d’un mois suivant sa saisine.
 
Dans son engagement n°39 de campagne présidentielle, François Hollande voulait créer une allocation d'étude et de formation (c'est fait), donner une impulsions aux échanges entre universités françaises et étrangères (c'est fait avec la loi Fioraso), abroger la circulaire Guéant sur les étudiants étrangers (c'est fait aussi), encadrer les stages pour éviter les abus, c'est enfin fait grâce à cette nouvelle loi.