mercredi 26 février 2014

Encadrer les stages pour aider la jeunesse

Génération Précaire va devoir trouver un vrai slogan
La mode des stages n'est pas prête de prendre fin, ce n'est d'ailleurs pas l'objectif de la loi tendant au développement, à l'encadrement des stages et à l'amélioration du statut des stagiaires votée dans la nuit de lundi à mardi à l'Assemblée Nationale. Pourtant cette loi est porteuse de nombreuses avancées qui seront utiles aux futurs stagiaires et aussi aux chercheurs d'emploi. En effet, les stages sont utiles et bénéfiques à de nombreux jeunes, c'est pourquoi toutes les écoles supérieures et les universités demandent à leurs étudiants de réaliser différentes périodes de stages durant leur cursus. 

Si une entreprise est légalement obligée à payer tout stagiaire qui effectue un "stage dans un même organisme d'accueil de plus de 2 mois, consécutifs ou non, au cours de la même année scolaire ou universitaire", elle a le droit de ne payer ce stagiaire qu'en respectant un minimum de 12,5% du plafond horaire de la Sécurité Sociale. Une entreprise peut donc payer un stagiaire 436,05€ pour un mois de travail à temps plein, soit 3 fois moins qu'un smicard ! Il est donc nécessaire d'encadrer toujours un peu plus l'utilisation des stages en entreprises pour empêcher des entreprises de remplacer de véritables emplois par des stages. Il est donc heureux de lire dans la nouvelle loi :
Art. L. 124-7. – Aucune convention de stage ne peut être conclue pour exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent, pour faire face à un accroissement temporaire de l’activité de l’organisme d’accueil, pour occuper un emploi saisonnier ou pour remplacer un salarié en cas d’absence ou de suspension de son contrat de travail.
Art. L. 124-8. – Le nombre de stagiaires dont la convention de stage est en cours sur une même semaine civile dans l’organisme d’accueil ne peut pas être supérieur à un nombre fixé par décret en Conseil d’État.

La nouvelle loi cherche également à mieux encadrer les stagiaires par des représentants de leur établissement scolaire. Depuis la précédente réforme su statut du stagiaire datant de 2006, une convention de stage est obligatoire pour obtenir un stage afin d'interdire les stages hors cursus universitaire. Pour palier cette contrainte, certaines "écoles" (qui n'ont d'école que le terme inscrit sur une plaque) proposent la vente de conventions de stage, comme par exemple à la "Central Business Langage Education (CBLE)" située dans le 4ème arrondissement de Paris qui propose des sésames pour 580€. C'est assez cher payé, surtout si l'on est payé 436€ par mois... Pour essayer de contrer cette pratique (je dis bien essayé car il y aura toujours des personnes pour se faire de l'argent sur la précarité), la loi précise : 
Art. L. 124-2. – L’établissement d’enseignement est chargé :
1° D’appuyer et d’accompagner les élèves ou les étudiants dans leur recherche de périodes de formation en milieu professionnel ou de stages correspondant à leur cursus et à leurs aspirations et de favoriser un égal accès des élèves et des étudiants, respectivement aux périodes de formation en milieu professionnel et aux stages ;
2° De définir dans la convention, en lien avec l’organisme d’accueil et le stagiaire, les compétences à acquérir ou à développer au cours de la période de formation en milieu professionnel ou du stage et la manière dont ce temps s’inscrit dans le cursus de formation ;
3° De désigner un enseignant référent au sein des équipes pédagogiques de l’établissement qui s’assure du bon déroulé de la période de formation en milieu professionnel ou du stage et du respect des stipulations de la convention mentionnées à l’article L. 124-1. Le nombre de stagiaires suivis simultanément par un même enseignant référent et les modalités de ce suivi régulier sont fixés par décret
;
Le stagiaire devra donc être suivi par un enseignant référent qui ne pourra suivre qu'un nombre restreint de stagiaires. Ceux qui ont été stagiaires savent que s'ils voient leur référent une fois durant leur stage, c'est déjà beaucoup. On peut espérer que le suivi sera meilleur ainsi. Au moins, si le stage se passe mal, ce qui peut mettre en difficulté le stagiaire dans la recherche d'un emploi futur, le stagiaire pourra se retourner vers son enseignant référent. Il aura la loi avec lui. Mais le plus important pour le stagiaire, c'est d'être bien encadré dans l'entreprise où il est plus que d'être suivi par un enseignant. Il y a aussi un article de loi pour ça:
Art. L. 124-10. – Un tuteur de stage ne peut pas être désigné si, à la date de la conclusion de la convention, il est par ailleurs désigné en cette qualité dans un nombre de conventions prenant fin au delà de la semaine civile en cours supérieur à un nombre fixé par décret en Conseil d’État.

Dans le cadre de son stage, le stagiaire, s'il ne doit pas remplir une mission correspondant à un véritable emploi. Pourtant il aura le droit, dès que son stage dépasse les 2 mois, à une protection similaire aux employés, dont la principale mesure est liée à la parentalité:
Art. L. 124-13. – En cas de grossesse, de paternité ou d’adoption, le stagiaire bénéficie de congés et d’autorisations d’absence d’une durée équivalente à celles prévues pour les salariés aux articles L. 1225-16 à L. 1225-28, L. 1225-35, L. 1225-37 et L. 1225-46 du code du travail
Mais également, il ne doit pas effectuer un stage dangereux pour sa santé :
« Il est interdit de confier au stagiaire des tâches dangereuses pour sa santé ou sa sécurité.

Il est bien d'essayer de protéger le stagiaire contre les abus, mais qu'est-il prévu pour dissuader réellement l'entreprise de ne pas mal employer ses stagiaires ? Elle risque des amendes dont le montant est quatre fois plus élevé que la rémunération d'un stagiaire. 
Art. L. 124-17. – La méconnaissance des articles L. 124-8 et L. 124-14 est constatée par les agents de contrôle de l’inspection du travail mentionnés aux articles L. 8112-1 et L. 8112-5 du code du travail.
Les manquements sont passibles d’une amende administrative prononcée par l’autorité administrative.
Le montant de l’amende est d’au plus 2 000 € par stagiaire concerné par le manquement et d’au plus 4 000 € en cas de réitération dans un délai d’un an à compter du jour de la notification de la première amende.
Le délai de prescription de l’action de l’administration pour la sanction du manquement par une amende administrative est de deux années révolues à compter du jour où le manquement a été commis.
L’amende est recouvrée comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine
.
Et si un employé souhaite contester devant les prudhommes la qualification de son stage pour le requalifier en contrat de travail, alors les prudhommes auront un mois maximum pour statuer sur le sujet :
Art. L. 1454-5. – Lorsque le conseil de prudhommes est saisi d’une demande de requalification en contrat de travail d’une période de formation en milieu professionnel ou d’un stage mentionnés à l’article L. 124-1 du code de l’éducation, l’affaire est directement portée devant le bureau de jugement qui statue au fond dans un délai d’un mois suivant sa saisine.
 
Dans son engagement n°39 de campagne présidentielle, François Hollande voulait créer une allocation d'étude et de formation (c'est fait), donner une impulsions aux échanges entre universités françaises et étrangères (c'est fait avec la loi Fioraso), abroger la circulaire Guéant sur les étudiants étrangers (c'est fait aussi), encadrer les stages pour éviter les abus, c'est enfin fait grâce à cette nouvelle loi.

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