Il y a bientôt 50 ans, en décembre 1964, André Malraux prononçait ces mots en l'honneur du transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon:
Comme Leclerc entra aux Invalides, avec son cortège d'exaltation dans le soleil d'Afrique, entre ici, Jean Moulin, avec ton terrible cortège. Avec ceux qui sont morts dans les caves sans avoir parlé, comme toi — et même, ce qui est peut-être plus atroce, en ayant parlé. Avec tous les rayés et tous les tondus des camps de concentration, avec le dernier corps trébuchant des affreuses files de Nuit et Brouillard, enfin tombé sous les crosses. Avec les huit mille Françaises qui ne sont pas revenues des bagnes, avec la dernière femme morte à Ravensbrück pour avoir donné asile à l'un des nôtres. Entre avec le peuple né de l'ombre et disparu avec elle — nos frères dans l'ordre de la Nuit…
Comme le disait Malraux, Jean Moulin entrait au Panthéon pour son action mais aussi pour que vive la mémoire de tous les résistants et les déportés victimes des nazis. En entrant au Panthéon, il rejoignait ces grands Hommes dont la Patrie est reconnaissante.
50 ans plus tard, ce vendredi, François Hollande devrait annoncer l'arrivée de 4 nouveaux "grands Hommes", tous ont eu à faire aux nazis ou à leurs alliés: Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Pierre Brossolette et Jean Zay.
Depuis quelques mois, de nombreuses associations féministes (mais pas uniquement) menaient un combat pour faire entrer plus de femmes au Panthéon. Leur collectif pour des femmes au Panthéon propose une liste de grandes Femmes où l'on retrouve Louise Michel, Olympe de Gouges, Simone de Beauvoir et aussi Germaine Tillion. On peut penser que leur lobby a porté ses fruits puisqu'avec ces nouvelles entrées, le nombre de femmes au Panthéon va doubler ! Autre grande nouveauté, les deux femmes qui entreront, entreront seules, sans leur époux, contrairement aux deux précédentes femmes, Marie Curie et Sophie Berthelot.
Je ne pense pas qu'il faille chercher à tout prix à atteindre une parité sous le dôme et dans la crypte du Panthéon, surtout que les premiers à y être entrés (Voltaire et Rousseau), l'ont fait respectivement en 1791 et 1794. Cela fait un sacré retard à rattraper. En revanche, j'aime l'idée que Bruno Nassim Aboudrar, professeur d'université, a développé dans une tribune pour Libération en janvier dernier. Pour ce professeur, il n'est pas obligatoire de chercher une "Grande Femme" à faire entrer au Panthéon mais une de ces femmes anonymes qui se sont battues pour leur pays. L'auteur de la tribune souligne que nombreux des 70 locataires du Panthéon sont d'illustres inconnus alors pourquoi ne pas rendre hommage à femmes dont le nom ne sont pas connus de la majorité des Français :
Jugées à l’aune de la majorité des hôtes de la sépulture, ce n’est pas Tillion ou Joséphine Baker qu’il y faudrait faire rentrer, mais telle infirmière dévouée, telle financière avisée (elle tiendrait compagnie à Jean-Frédéric Perregaux, directeur de la Banque de France), une magistrate. Mais, quand il suffit à un homme d’avoir été «grand», et souvent très petitement grand, il faut à une femme avoir été immense pour que sa dépouille prétende à la reconnaissance de la patrie.
A défaut de suivre ces conseils, soulignons le choix de François Hollande de vouloir faire entrer 2 grandes Femmes. Nous ne sommes pas obligés de faire du nombre en transférant de nombreuses femmes pour corriger les choix du passé. En revanche, il est un symbole de vouloir faire entrer à présent soit que des femmes, soit un nombre égal de femmes et d'hommes. Ainsi la mère Patrie pourra être reconnaissante de ses fils comme de ses filles.
Ginette Lacaze, ma vieille voisine qui ne va pas tarder à mourir, me charge de vous faire savoir qu'elle irait volontiers au Panthéon, dans la mesure où, toute sa vie, elle a sublimement réussi le bœuf en daube.
RépondreSupprimerJ'appuie bien évidemment sa requête, on ne peut plus légitime.
Le boeuf en daube, ça devrait plaire aux locataires du lieu, ça les changerait des pissenlits par la racine
SupprimerNon. (avec tout mon respect pour Ginette).
RépondreSupprimerIl va dans le sens de l'auteur de la tribune qui concluait en proposant de prendre des femmes au hasard...
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