Un voisin parisien d'un bord politique différent mais pas si éloigné que ça m'a signalé son billet fort intéressant sur l'évolution de la déchéance de la nationalité française. Est-ce l'air du temps qui est au rassemblement républicain, est-ce par ce que ces derniers temps des dénommés républicains ne méritent pas leur étiquette, toujours est-il qu'une nouvelle fois, nous nous retrouvons sur un sujet qui n'est pas théoriquement pas neutre dans le clivage gauche-droite.
Lors du dernier quinquennat, j'avais raillé les propositions de Nicolas Sarkozy sur l'évolution de la déchéance de nationalité telle que présentée. Difficile de ne pas avoir un drôle de sursaut quand on entend un gouvernement de gauche (si si de gauche messieurs les vrauchistes) réfléchir à une extension du droit à la déchéance de nationalité.
Mon voisin indépendant du 4e résume parfaitement en 3 points pourquoi vouloir dénationaliser certains citoyens français est idiot :
- ça impliquerait la création de citoyens français de seconde zone, des sous-citoyens qui, nés Français de parents étrangers, seraient soumis à des lois que le Français né de parents français serait exempté.
- car les terroristes, convaincus bêtement d'un avenir paradisiaque, n'ont rien à faire d'avoir la nationalité française.
- cela montrerait l'échec du système français qui reconnaitrait que des enfants français nés et éduqués sous le système républicain pourraient se retourner contre leur propre nation et leur propre état.
Je ne peux qu'être d'accord avec lui, surtout sur les 2 premiers points. Bien sur, je suis contre la création de citoyens de secondes zones. Je suis pour faciliter l'obtention de la nationalité française, comme l'a fait Manuel Valls, ministre de l'intérieur à l'époque, et non faciliter l'exclusion comme l'avait voulu Nicolas Sarkozy à une époque heureusement révolue.
Je suis entièrement d'accord également sur le principe qu'un terroriste ne sera pas effrayé par la crainte de perdre la nationalité française. Ces terroristes sont majoritairement sous l'emprise d'une idéologie qui les poussent à les convaincre qu'ils finiront morts en martyrs. Dans cette situation mourir en martyr citoyen français ou non, ça ne changera pas grand chose.
Sur le troisième point, je suis moins catégorique. Je suis d'accord avec Gilles Kepel quand il dit que le FN et Daesh grandissent sur le même terreau. Certes cela signifie un échec du système français, mais comme ce comportement se retrouve dans d'autres pays, je pense plus à un plus grand attrait pour un autre combat que celui de l'essor national. Ce grand combat peut être soit-disant religieux pour certains, soit-disant patriotique pour d'autres.
Ce qui me choque principalement dans cette idée de déchéance de nationalité de Français bi-nationaux, c'est cette idée qu'avoir une nationalité est un risque pour la nation. Dans l'histoire proche européenne, c'étaient les juifs que l'on voulait rendre apatride, de façon à pouvoir les déporter n'importe où plus facilement. Plus tôt, la déchéance de nationalité pouvait empêcher d'avoir des "traitres" dans les rangs des conscrits forcés. Aujourd'hui, le service militaire n'est plus obligatoire, nous n'avons pas une nation de réservistes, nous avons une armée de métier. Nous ne risquons pas d'avoir sous les drapeaux des "ennemis du peuple" qui profiteraient d'un appel général pour saboter l'armée française de l'intérieur.
Si par hasard nous arrivons à arrêter vivant un terroriste français, qu'il soit français de descendance française, français de descendance étrangère, français d'acquisition ou étranger, l'important est de juger une personne selon la loi française. Normalement, cette personne doit finir derrière les barreaux, si possible isolée de personnes sensibles afin de l'empêcher d'embrigader des esprits malléables.Dans ces cas, la peur du gendarme, la peu de la déchéance ou la peur de l'indignité nationale n'aura aucun effet. Au lieu de s'efforcer de nouvelles mesures de répressions, nous devrions mieux s'acharner sur un sujet qui est au centre de l'action du gouvernement, la lutte pour une meilleure éducation pour tous. Cela passe pas plus de dialogue à l'école, par des cours plus ouverts sur le monde qui nous entoure, par un effort quotidien contre tout genre de stéréotypes, que ce soit contre les stéréotypes de genres, contre les stéréotypes sur les catégories professionnelles des parents ou sur les actes de l'entourage des enfants.
Tout ceci pour répondre à la question de mon voisin sur mon avis sur son article à propos de la déchéance de nationalité. Je suis contre toute déchéance de nationalité. Dès que la France a donné sa confiance en une personne en lui donnant la nationalité française, elle n'a aucune raison de la lui enlever. De la même façon, pour tout personne qui a eu la chance de naitre en respectant les conditions pour être Français, alors peu importe qu'ils aient ou non une autre nationalité. Toutes ces personnes sont Françaises et méritent de l'être jusqu'au bout. Si elles ne respectent pas le droit français, alors elles doivent être soumises à la législation française, à des peines de privations de liberté à perpétuité s'il le faut. En revanche, la déchéance de nationalité, non merci.