mercredi 9 janvier 2013

Un avenir pour les biens culturels ?

Image issue de franceinfo.fr
Avis de mauvais temps sur la culture. Non, ce n'est pas le départ de Gérard Depardieu ou de Jean-Michel Jarre qui m'inquiète mais l'avenir des "dealers" de culture, ces fournisseurs d'une autre époque qui n'ont pas réussi à prendre correctement le virage du numérique. Ce mercredi, Virgin Megastore va déposer le bilan. 19 des 26 magasins n'auraient pas réussi à payer leur loyer pour le dernier trimestre de l'année 2012. Avant ce naufrage en grande pompe, de nombreux disquaires et libraires indépendants ont déjà du baisser leur store sans fleur ni couronne (comme la librairie Charlemagne dans le 4ème arrondissement en juillet dernier).

Le premier suspect est assez facile et sert même d'alibi parfait aux victimes : internet ! Itunes, Amazon, le téléchargement illégal, voici les principaux accusés. Après les avoir accueilli à bras ouverts, les voyants comme les sauveurs d'une profession déjà sur le déclin, ils ont réussi à redonner un coup de fouet au marché des biens culturels. A présent, avec leur position dominante sur le net, on les accuse de ne laisser que des miettes aux acteurs "historiques".

Deuxième suspect, les gros revendeurs eux-mêmes. Je ne suis pas persuadé qu'ils aient eu beaucoup de pitié à leur installation envers les petits indépendants présents avant eux. Les mastodonte de la vente de biens culturels sont arrivés, ont profité de nombreux cadeaux difficilement applicables aux petits commerçants, comme le droit à l'ouverture le dimanche ou la remise de 5% sur les livres par exemple. Aujourd'hui, le gros poisson est en train de se faire manger, entre autre car il n'a pas réussi à s'adapter à son nouveau milieu. Virgin a commencé à vendre de la musique en téléchargement en 2004 et n'ont jamais (à ma connaissance) ouvert de magasin en ligne, à la différence de la Fnac. Pire, alors qu'un livre ou un cd acheté dans un de leur magasin peut être prêté, échangé, revendu, leurs produits numériques sont attachés à une seule personne, voire à un seul appareil électronique, là où ils auraient pu se démarquer des géants américains mondialement critiqués pour leurs systèmes ultra-verrouillés. On justifie régulièrement les salaires mirobolants des patrons par leur prise de risque et leur vision à long terme. Force est de constater que ce ne sont pas les choix les plus judicieux qui ont été appliqués par le fonds de pension Butler qui gère la maison Virgin France...

Troisième suspect, le client. Que vaut un cd ? un film ? un livre ? Pourquoi payer pour quelque chose que l'on trouve gratuitement ? Après un rapide sondage dans mon entourage, de plus en plus rare sont ceux qui achètent des cd pourtant la quasi totalité écoute de la musique à un moment de la journée... Dans un  comportement que je ne comprends pas, il semble naturel de dépenser 1 500€ dans une télévision, 500€ dans un téléphone qui permet d'écouter de la musique mais il semble difficilement imaginable de payer plus de 15€ par mois pour avoir accès à de la musique en illimité... Mais toute la chaine musicale a besoin de vivre, donc aujourd'hui les prix se sont reportés sur les concerts (177,50€ pour Leonard Cohen, 22€ pour 77 Bombay street, 2 exemples de concerts parisiens en 2013). Si le client ne visualise pas qui se cache derrière la production de son cd, il voit son artiste en vrai, et ça, ça n'a quasiment pas de prix (et je suis bien placé pour en parler vu mon budget concerts annuel...). Mais le public commence déjà à bouder ces tarifs exorbitants, quelle sera la prochaine mesure palliative ?

Trois suspects donc, mais combien de solutions ou à minima de propositions ? Un exemple, le retour à la bonne vieille méthode de l'union fait la force. Aujourd'hui 800 libraires indépendants se sont regroupés sur le site LaLibrairie.com, offrant ainsi à leurs clients un catalogue bien plus vaste que ne peux leur offrir leur simple boutique tout en gardant ce contact humain si indispensable, ou un simple inventaire des stocks disponible chez près de 300 libraires comme le propose le site Place des libraires. Une autre solution, le retroussage de manches et l'espoir que la roue tourne en leur faveur un jour, comme par exemple les excellents Thomas Howard Memorial qui arpentent les salles de concerts de France et de Bretagne (ils seront au Chinois à Montreuil le 23 janvier), enchainent les tremplins (comme celui des Inrocks en 2012), et mettent en libre écoute leurs nouveaux morceaux sur le web. 

Hélas, je ne pense pas que la solution se trouvera dans un de ces exemples. Un nouveau modèle est à inventer qui arrivera à mélanger le physique et le dématérialisé, un système qui réussirait à laisser une part conséquente à la masse de ces petits (commerçants, artistes, techniciens) qui vivent aujourd'hui à l'ombre des géants aux pieds d'argile.

1 commentaire:

  1. Je pense qu'ils ont trop tiré sur la corde, j'en parlais avec un spécialiste de la réglementation douanière: un cd ne coûte rien, maintenant, même en incluant les droits de l'artiste. Ils n'ont que récemment baissé leurs prix.
    Effectivement, c'est la rançon de la dictature du marché et d'une certaine entente de certains acteurs de celui-ci.
    Par contre, j'achète des cd en occasion ou en promo et parfois neufs pour les cadeaux. Je suis très mélomane.
    Bonne année à toi et merci de ton amitié!

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