mercredi 20 août 2014

Juppé attaque pour contrer Sarkozy

La prochaine élection présidentielle se déroulera dans un peu moins de trois ans. François Hollande n’a pas encore atteint la moitié de son quinquennat. L’UMP est en train de préparer une élection interne pour choisir son futur dirigeant après la démission de Jean-François Copé. Toutes ces questions temporelles ne semblent pas embarrasser Alain Juppé puisqu’il a décidé que le moment était choisi de déclarer sa candidature à la future primaire UMP pour désigner le futur candidat UMP à l’élection présidentielle.

Alain Juppé, du haut de ses 69 ans, n’est pas un perdreau de l’année. Il sait très bien que cette annonce ne respecte pas un rythme naturel, qu’ainsi il se met en pleine lumière alors que ses silences et rares apparitions lui avaient procuré un statut de "sage" au près des sympathisants de droite. Mais à deux ans d’une hypothétique primaire et à trois ans de la date fatidique, le temps presse. Dans les deux semaines à venir, Nicolas Sarkozy va annoncer très officiellement son retour. La seule question qui se pose (et encore) est va-t-il daigner s’abaisser à se présenter pour prendre la tête de l’UMP ou va-t-il soutenir un sous fifre candidat qui aura la charge de préparer son retour pour 2017.

En se déclarant candidat à la primaire, il impose au futur patron de l’UMP l’organisation de cette primaire. Il empêche Nicolas Sarkozy de se présenter comme le seul recours possible de la droite pour sauver la France. En 2007, Juppé avait accepté de se coucher devant un Nicolas Sarkozy qui s’était rendu seul maitre à bord de l’UMP. Il ne veut pas se faire avoir dix ans plus tard. Avec cette candidature, Alain Juppé essaye de se positionner au dessus des querelles internes de partis. S’il a accepté de participer au triumvirat, c’est uniquement pour « remettre de l’ordre dans la maison UMP ». En revanche hors de question de jouer le chef de file de l’opposition pendant 3 ans.

Dans sa déclaration de candidature, Alain Juppé se montre sévère envers tous ses camarades qui sont restés sur la ligne Sarko-Buisson. Il souhaite une ouverture large vers le centre et l’abandon de l’idéologie de repli sur soi du FN. Son ouverture au centre est sa première condition à une victoire de la droite.
Sa deuxième condition est plus bancale. Il part du postulat que la situation de la France en 2017 sera la même qu’actuellement en août 2014. Pour cela il veut que la France renoue avec la croissance, tout comme le gouvernement actuel. D’après lui, le "facteur déclenchant sera le retour de la confiance des acteurs économiques, investisseurs et producteurs, consommateurs et exportateurs. Et la confiance se construit sur l’apaisement des tensions inutiles, sur la visibilité et la stabilité des politiques publiques, sur le dialogue dans le respect entre les partenaires". Il exprime ainsi l’exacte ligne du gouvernement Hollande-Valls : maintenir le cap politique actuel, travailler avec les partenaires sociaux pour réformer (ANI, formation professionnelle, les futurs seuils sociaux).

Alain Juppé a décidé de partir tôt pour avoir, au moins pour quelques jours, l’avantage sur Sarkozy, Wauquiez ou Fillon. Absence d’idées nouvelles ou peur de se faire piller son programme, l’annonce de Juppé n’est qu’une déclaration remplie de critiques mais sans contenu. Ses opposants, qu’ils soient de son parti ou de gauche, n’ont donc pour le moment que des arguments fallacieux comme son âge ou son passé judiciaire pour l’attaquer. Sur ce dernier point, il a payé pour ce qu’il a été condamné. C’est le but des peines et du principe de réinsertion. Une fois la peine purgée, on redevient un citoyen comme les autres. Critiquer son retour est un non sens, spécialement pour les sympathisants de gauche. Au même titre, je pense qu’on aurait tort de résumer Alain Juppé à un homme qui aura 72 ans en 2017 (et donc 77 ans à la fin du prochain quinquennat). Il me semble plus apte à diriger que de nombreux quinquas de l’UMP aux dents longues mais sans ligne directrice.

C’est justement de sa fidélité à sa pensée politique qu’il faudra se méfier du candidat Juppé. Il prône l’apaisement et le dialogue dans le respect alors qu’il a réussit à faire descendre plus d’un million de manifestants quand il était Premier Ministre. C’est cette politique libérale qu’il faudra suivre et contrer. Quand François Fillon parle ouvertement de réforme à la Thatcher, Alain Juppé se tait mais n’en pense pas moins.

Le duel Alain Juppé / Nicolas Sarkozy, n’est pas un conflit de génération mais deux visions distinctes de ce que doit être la droite française.

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