La prochaine élection présidentielle se déroulera dans un
peu moins de trois ans. François Hollande n’a pas encore atteint la moitié de
son quinquennat. L’UMP est en train de préparer une élection interne pour choisir
son futur dirigeant après la démission de Jean-François Copé. Toutes ces
questions temporelles ne semblent pas embarrasser Alain Juppé puisqu’il a
décidé que le moment était choisi de déclarer sa candidature à la future
primaire UMP pour désigner le futur candidat UMP à l’élection présidentielle.
Alain Juppé, du haut de ses 69 ans, n’est pas un perdreau de
l’année. Il sait très bien que cette annonce ne respecte pas un rythme naturel,
qu’ainsi il se met en pleine lumière alors que ses silences et rares
apparitions lui avaient procuré un statut de "sage" au près des
sympathisants de droite. Mais à deux ans d’une hypothétique primaire et à trois
ans de la date fatidique, le temps presse. Dans les deux semaines à venir,
Nicolas Sarkozy va annoncer très officiellement son retour. La seule question
qui se pose (et encore) est va-t-il daigner s’abaisser à se présenter pour
prendre la tête de l’UMP ou va-t-il soutenir un sous fifre candidat qui
aura la charge de préparer son retour pour 2017.
En se déclarant candidat à la primaire, il impose au futur
patron de l’UMP l’organisation de cette primaire. Il empêche Nicolas Sarkozy de
se présenter comme le seul recours possible de la droite pour sauver la France.
En 2007, Juppé avait accepté de se coucher devant un Nicolas Sarkozy qui s’était
rendu seul maitre à bord de l’UMP. Il ne veut pas se faire avoir dix ans plus
tard. Avec cette candidature, Alain Juppé essaye de se positionner au dessus
des querelles internes de partis. S’il a accepté de participer au triumvirat, c’est
uniquement pour « remettre de
l’ordre dans la maison UMP ». En revanche hors de question de jouer le
chef de file de l’opposition pendant 3 ans.
Dans sa déclaration de candidature, Alain Juppé se montre
sévère envers tous ses camarades qui sont restés sur la ligne Sarko-Buisson. Il
souhaite une ouverture large vers le centre et l’abandon de l’idéologie de
repli sur soi du FN. Son ouverture au centre est sa première condition à une
victoire de la droite.
Sa deuxième condition est plus bancale. Il part du postulat
que la situation de la France en 2017 sera la même qu’actuellement en août
2014. Pour cela il veut que la France renoue avec la croissance, tout comme le
gouvernement actuel. D’après lui, le "facteur
déclenchant sera le retour de la confiance des acteurs économiques,
investisseurs et producteurs, consommateurs et exportateurs. Et la confiance se
construit sur l’apaisement des tensions inutiles, sur la visibilité et la stabilité
des politiques publiques, sur le dialogue dans le respect entre les partenaires".
Il exprime ainsi l’exacte ligne du gouvernement Hollande-Valls : maintenir
le cap politique actuel, travailler avec les partenaires sociaux pour réformer
(ANI, formation professionnelle, les futurs seuils sociaux).
Alain Juppé a décidé de partir tôt pour avoir, au moins pour
quelques jours, l’avantage sur Sarkozy, Wauquiez ou Fillon. Absence d’idées
nouvelles ou peur de se faire piller son programme, l’annonce de Juppé n’est qu’une
déclaration remplie de critiques mais sans contenu. Ses opposants, qu’ils
soient de son parti ou de gauche, n’ont donc pour le moment que des arguments fallacieux
comme son âge ou son passé judiciaire pour l’attaquer. Sur ce dernier point, il
a payé pour ce qu’il a été condamné. C’est le but des peines et du principe de
réinsertion. Une fois la peine purgée, on redevient un citoyen comme les
autres. Critiquer son retour est un non sens, spécialement pour les
sympathisants de gauche. Au même titre, je pense qu’on aurait tort de résumer
Alain Juppé à un homme qui aura 72 ans en 2017 (et donc 77 ans à la fin du
prochain quinquennat). Il me semble plus apte à diriger que de nombreux quinquas
de l’UMP aux dents longues mais sans ligne directrice.
C’est justement de sa fidélité à sa pensée politique qu’il
faudra se méfier du candidat Juppé. Il prône l’apaisement et le dialogue dans
le respect alors qu’il a réussit à faire descendre plus d’un million de
manifestants quand il était Premier Ministre. C’est cette politique libérale qu’il
faudra suivre et contrer. Quand François Fillon parle ouvertement de réforme à
la Thatcher, Alain Juppé se tait mais n’en pense pas moins.
Le duel Alain Juppé / Nicolas Sarkozy, n’est pas un conflit
de génération mais deux visions distinctes de ce que doit être la droite française.
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