lundi 14 avril 2014

APL, AME : qui veut économiser sur la solidarité ?

En ces temps de rigueur, il est bon de rappeler un principe essentiel, légèrement couteux certes mais essentiel, la solidarité et l’entraide. François Hollande a décidé de trouver 50 milliards d’économie. La Cour des Comptes, jamais la dernière en termes d’idées d’économie, a justement un axe d’économie qu’elle met en avant depuis 2007, la suppression (ou la restriction) des APL (Aides Personnalisées au Logement). La Cour des Comptes a déjà tenté des approches avec Christine Boutin en 2008 et avec François Baroin en juillet 2010. Ceci n’est qu’une piste évoquée par la Cour des Comptes et non pas un projet de loi du gouvernement.

Cette piste aura au moins le mérite de reconcentrer tout le monde sur des questions politiques et non plus uniquement sur la nomination d’un tel ou d’une telle au ministère ou à un secrétariat d’état. Les syndicats étudiants ont tout de suite, et à juste titre, annoncé leur opposition à cette potentielle réforme. Christian Estrosi, oubliant un peu vite les propositions de ses camarades Boutin et Baroin, est lui aussi monté au créneau. Pour lui, il est hors de question de toucher aux APL, qui reviennent principalement aux locataires français. En revanche, quitte à faire des économies, autant il ressort son cheval de bataille préférer, la lutte contre l’AME et ces « profiteurs d’étrangers ». Oh la belle grosse ficelle xénophobe ! L’Etat voudrait empêcher sa jeunesse d’étudier pour pouvoir dilapider plus d’argent au près des sans-papiers. Belle comparaison entre deux éléments qui n’ont aucun rapport entre eux.

Je vais tout de même profiter de la sortie du maire de Nice pour rappeler que cette aide aux étrangers n’est qu’une mesure de santé publique. Comme son nom l’indique, une mesure de santé publique bénéficie à l’ensemble de la sphère publique et non uniquement à une minorité. Quitte à surprendre monsieur Estrosi, la maladie n’a pas de frontière et les microbes ne demandent pas les papiers de leurs futures victimes. Si une famille arrivée clandestinement en France est touchée par la tuberculose (du fait à tout hasard de conditions de vie extrêmes), cette maladie sera transmissible à tous. Il est donc utile et nécessaire de prévenir toute épidémie en permettant à tous d’être soignés de façon efficaces. Le dicton « il vaut mieux prévenir que guérir » s’applique aussi au financement des frais de santé.

Devons-nous nous interdire de toucher aux APL ? Si des économies doivent être réalisées, on peut étudier une nouvelle utilisation de ces APL. Il est bien sur hors de question de les réserver aux seuls étudiants boursiers. Beaucoup trop d’étudiants se retrouveraient lésés et forcés de choisir leurs études supérieures (et donc une bonne partie de leur avenir) selon la situation géographique de leurs parents.
En revanche,  pourquoi ne pas étudier la prise en compte des revenus des parents dans l’attribution de l’APL. Cette aide pourrait être inversement proportionnelle au revenu de l’étudiant cumulé aux revenus des parents, tout en prenant en compte la situation des jeunes adultes en rupture avec leurs parents et donc non sujets à bénéficier d’une aide de leur part. Car si délimiter l’attribution de l’APL uniquement sur bénéfice d’une bourse est injuste, la même somme à 2 étudiants, l’un issu famille avec revenus médians et l’autre issu famille 20% les plus riches n’est pas juste non plus.

Dans le cadre de la recherche d’économies, il faut préférer les nouvelles solutions aux simples coupes budgétaires. On attend depuis 2012 une remise à plat de la fiscalité. On pourrait imaginer une remise à plat des systèmes d’aides pour éviter tout systématisme. L’Etat ferait ainsi un geste fort pour encourager sa jeunesse la moins favorisée à suivre les mêmes formations que sa jeunesse la plus aisée. Les économies seront surement moins grandes et satisferont donc moins la Cour des Comptes mais elles laisseront moins de Français sur le côté.
De la même façon, la recherche d’économie ne doit pas être un prétexte pour s’exempter de solidarité. Dans les propos de Christian Estrosi, j’ai retrouvé tout ce pourquoi j’ai milité pour un gouvernement socialiste et contre un gouvernement de droite. Dans ces propos, on retrouve la stigmatisation des étrangers, le refus de solidarité même sur des questions de santé publique. Dans ces propos, on entend encore l’écho des attaques contre les chômeurs, ce cancer de l’assistanat, ou contre les étudiants étrangers. Quoi qu’en dise les mauvaises langues, ce gouvernement est bien loin de ces propos. Une dernière preuve ? Quelques réactions sur ce sujet de restriction de l’APL aux étudiants boursiers :

Geneviève Fioraso : "S'agissant de la suppression des APL pour les non boursiers, ce n'est pas à l'ordre du jour. Il n'est pas question que l'on touche à la qualité de vie des étudiants car ça conditionne leur réussite"
Najat Vallaud-Belkacem : "La suppression des APL pour les non boursiers n'a jamais été envisagée. Notre gouvernement a pour priorité d'investir sur la jeunesse et sûrement pas de la précariser."

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