Il y a des nouvelles affreuses qui vous arrivent de bon
matin et dont il est difficile de faire abstraction. Ce matin, le point info de
8h01 a une nouvelle fois évoqué le conflit syrien en une simple phrase. Inutile
d’en faire plus que de rappeler inlassablement que ce conflit est sans fin et
que quotidiennement des personnes y meurent. Pourtant cette phrase, prononcée
rapidement entre 2 autres sujets m’a fait poussé un cri d’effroi. Quel était le sujet précédent ? Quel était le sujet
suivant ? Aucune idée, le point info de 8h ce matin, débuté sous les
excuses de Marc Voinchet pour cette minute de retard, s’est résumé en cette
unique phrase.
« Le père Frans Van Der Lugt a été assassiné devant son domicile à Homs, en Syrie. »
J’avais eu la chance de rencontrer le père Frans lors de mes
deux séjours syriens. Le prêtre animait la communauté chrétienne de Homs depuis
de nombreuses années. Je l’avais tout d’abord rencontré pour le mariage de mon
cousin. Si la religion n’est pas le domaine principal des préoccupations dans
ma famille, le père Frans réussissait à nous atteindre avec ces mots. De la
même façon, quand je l’ai revu quelques années plus tard, animant un de ces
nombreux week-ends pour la jeunesse de Homs, il discutait librement, malgré la
différence d’âge avec ses jeunes protégés, de la vie quotidienne, de l’avenir.
Depuis le début du conflit syrien, le père Frans avait
décidé de rester à Homs. La Syrie était devenue son pays d’adoption et il ne
voyait pas pourquoi il l’abandonnerait dès que la situation tournait au
vinaigre ou, dans le cas présent, à l’état de siège. En début d’année 2014, peu
de temps avant le 3ème anniversaire du conflit, il avait lancé un appel à l’aide
à la communauté internationale. Homs mourrait du siège des forces d’Al Assad.
La nourriture manquait à toute la population cloitrée dans la ville. Les nouveau-nés
étaient difficilement alimentés. Le prêtre hollandais expliquait : "Notre ville est devenue une véritable
jungle. Nous faisons de notre mieux pour agir fraternellement, de manière à ne
pas nous retourner les uns contre les autres à cause de la faim." Il
expliquait également les conséquences de cet enfermement forcé sur l’état
psychologique des habitants : "Certains
souffrent de troubles mentaux : névrose, crises de panique, épisodes
psychotiques et schizophréniques, paranoïa. J'essaie de les aider, non pas en
analysant leurs problèmes, car ils sont flagrants et il n'y a pas de solution
ici, mais en les écoutant et en leur donnant le plus de nourriture possible."
Lundi 7 février, le père Frans est mort abattu d’une balle
dans la tête. Son nom rejoint les 150 000 victimes syriennes depuis 2011. C’est la première fois que je suis confronté à la mort d’une
personne au sein d’un conflit. Toutes mes pensées vont vers ses proches et
toutes les personnes qui l’ont côtoyé ne serait-ce qu’une journée.
et jusque lors 0 commentaire à ton billet. Non que je me moque, loin de là, mais peut-etre cette impression désagréable autant que scandaleuse qui veut que de la Syrie, en France, tout le monde s'en fout. Ou peu s'en faut.
RépondreSupprimerRIP sincère pour le père Frans