Dans la nuit de samedi à dimanche, les sénateurs ont voté pour l'ANI, cet accord national interprofessionnel tant honni par l'opposition de gauche. Le vote fut compliqué, on pouvait s'y attendre. Si à l'Assemblée Nationale, le texte avait recueilli une très large majorité de voix (250 pour, 26 contre), le vote avait été marqué par la forte abstention dans les rangs de la majorité (36 abstentions). Connaissant le pouvoir contestataire des sénateurs de gauche, on pouvait donc craindre le pire.
On a d'ailleurs failli avoir le pire. Après avoir déposé 5 622 amendements à l'Assemblée Nationale, les sénateurs communistes avaient déposé plus de 400 amendements au Palais du Luxembourg. L'intention était simple, ralentir le plus possible l'adoption de cette loi sur le travail. Les gauchistes tendance Mélenchon et les syndicalistes tendance Bernard Thibault n'ont eu cesse de critiquer cette accord signé par le patronat et 3 organisations syndicales majoritaires, dont la CFDT. C'est d'ailleurs ce point qui a du dérangé le plus nos camarades opposants de gauche. Après avoir réussi à former une majorité parlementaire et gouvernementale sans eux, ils se sont également retrouvés à l'écart dans les accords interprofessionnels. François Hollande peut donc faire passer sa loi de sécurisation de l'emploi sans difficulté puisque soutenu par une majorité d'élus parlementaires et professionnels. Pire que tout, le dialogue social va à court terme se retrouver sacralisé dans la constitution, cet acte risque donc d'être le premier d'une longue série dans les 4 années à venir.
Étrangement, ce fonctionnement que je rapproche instinctivement à d'autres social-démocraties d'Europe du Nord, un camarade blogueur y trouve un goût de Tatcherisme... Donc pour certaines personnes, écouter les syndicats représentants des travailleurs, élus à l'issue d'élection professionnelle, équivaut à une politique de casse sociale et de destruction de l'action syndicale... J'y vois plutôt un encouragement de cette action syndicale. Si aujourd'hui les syndicats mobilisent un peu plus de 40% des salariés aux élections professionnelles, le nombre d'adhérents est inférieur à 10% des salariés. En mettant les syndicats au cœur du processus législatif, j'espère que les salariés comprendront qu'un syndicat n'est pas là uniquement pour organiser des barbecues en bloquant leur entreprise mais pour défendre les salariés, tous les salariés, les défendre quand ils sont en difficulté individuellement, les défendre collectivement quand leur entreprise est en difficulté mais aussi les défendre dans leur vie quotidienne, comme la réforme des retraites ou l'aménagement du temps de travail. Par exemple, dans de nombreuses entreprises, les syndicats ont été consultés mais pas écoutés dans l'aménagement des 35 heures car ils ne représentaient pas assez de salariés suite aux élections professionnelles.
L'ANI, et son pendant législatif signé par les deux assemblées, est le premier pas tant attendu vers une social-démocratie. Ce n'est pas, comme j'ai pu le lire, une perte de pouvoir des parlementaires puisqu'ils auront toujours leur mot à dire, ils pourront toujours débattre, amender et voter les textes de loi. C'est en revanche un progrès de négocier avant le contenu d'un texte plutôt que de mettre les syndicats et les patrons devant le fait accompli. Si ce processus avait été suivi il y a trois ans pour la réforme des retraites, cette réforme n'aurait pas du tout eu la même allure.
Personnellement, je trouve ce projet vraiment fort. On peut critiquer beaucoup de choses à ce gouvernement mais cet accord est sur de nombreux aspects vraiment une avancée pour notre pays.
RépondreSupprimerJe vais me permettre de répondre a ceux qui considère les syndicats non représentatif. Si l'on va au bout du raisonnement les partis politique ne sont pas non plus représentatif car le pourcentage de français ayant une carte dans un parti est ridicule et a chaque élection le nombre de votant diminue dramatiquement.
Or critiquer ceux qui s'engagent pour les autres et qui le fond le plus souvent par conviction n'a rien de très constructif. De plus, n'importe qui peut devenir adhèrent et participer au fonctionnement des instances représentatives. Que faire? Rendre l'adhesion obligatoire (personnellement je suis pour), exclure des accords les salariés non adhèrent (c'est injuste mais le nombre d'adhérent exploserait et permettrait peut être de résoudre les problèmes de financement des syndicats).
Quoiqu'il en soit, inclure les OS dans les décisions concernant les salariés est à la fois intelligent et novateur. Espérons que ça dure.
Je suis d'accord sauf sur tes solutions pour augmenter le nombre d'adhérents. A mon avis, c'est aux OS d'arriver à attirer de nouveaux adhérents. C'est sur il y a du boulot et ça prendra du temps (je le vois en ce moment dans ma boite), mais c'est ce genre d'accord qui vont réussir à faire changer les mentalités.
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