jeudi 5 décembre 2013

Aussaresse est mort, pas la torture

Le général Aussaresse est mort à l'âge de 95 ans. Son principal fait d'arme pour le grand public fut de rendre public les actes de torture qu'il a réalisé lors de la guerre d'Algérie. Son plus gros défaut fut de ne jamais avoir montré ni remords ni de regrets pour ses agissements.

Quitte à surprendre, j'ai apprécié la prise de parole de ce général à l'aube des années 2000. Il a expliqué au Monde ses agissements, ses méthodes. Il expliqua les meurtres qu'il a commis ou commandité dont ceux de Larbi Ben M'Hidi et Ali Boumendjel alors que l'armée française persiste à évoquer le suicide de ces personnes. Ces propos sont d'autant plus utiles qu'ils illustrent une époque toujours floue de l'histoire française. Souvenons-nous que pour la France, ce qu'il s'est passé en Algérie de 1954 à 1962 n'était considéré que comme de simples événements jusqu'à la fin des années 90. Il aura fallu attendre 1999 pour que l'état français décide de parler officiellement de "Guerre d'Algérie". Les confessions de ce général à la retraite auront permis d'éclaircir par le biais d'un témoignage direct la zone d'ombre des actions menées par les militaires français en Algérie durant cette guerre.

Hélas, les déclarations de Paul Aussaresse n'ont pas servi à faire avancer plus le sujet puisque l'armée ne profitera pas de l'occasion pour faire son procès. En gardant le silence, l'armée continue de donner l'impression de refuser d'accepter sa participation à une guerre mais uniquement à une simple et légitime lutte contre des terroristes. Ce qui aggrave son cas puisqu'en gardant un tel comportement, elle tente de légitimer la torture en cas de combat contre le terrorisme. On retrouve là le même comportement que celui de l'armée américaine. Sous prétexte de lutte contre le terrorisme, l'armée américaine s'autorise à torturer toute personne suspecte, s'interdisant simplement la torture sur son propre territoire. Il y aurait donc pour ces militaires deux types d'individus, ceux qui ont le droit d'être traités humainement et ceux qui n'ont le droit à rien, bafouant de fait toutes les conventions de Genève.

Aussaresse a enfoncé une porte ouverte en évoquant la torture en Algérie mais les réactions de l'armée suite à ses propos ont montré que nombreux étaient ceux qui n'étaient pas prêts à affronter la vérité. Accompagnés des récits d'exactions en Syrie, en Irak, à Guantanamo, les propos d'Aussaresse restent hélas tristement d'actualité. Pour s'en souvenir, voici un film réalisé pour une campagne d'Amnesty International montrant les actes de torture du point de vue de la personne torturée :

3 commentaires:

  1. En pointant du doigt l'armée et uniquement elle dans cette affaire, tu te montres plus que partial en oubliant le politique. L'armée a, en Algérie, obéit et fait ce qu'on lui demandait de faire.

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    1. Je me montre partial parce que j'ai entendu Hollande parler de torture en Algérie devant le parlement algérien et parce que j'ai vu Chirac retirer la légion d'honneur d'Aussaresse.

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  2. Chirac, ce jour-là, s'est (une fois de plus) déshonoré, en infligeant ce camouflet à un grand résistant ; tout cela pour complaire à deux ou trois associations de fiotes, genre LDH. Et, bien entendu, cette forfaiture a été perpétrée "au nom de la France", c'est-à-dire de tous les Français, à qui on s'est bien gardé de demander leur avis.

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