mercredi 21 janvier 2015

L'indigne indignité nationale

Jusqu’à peu, la vision à droite des terroristes était assez simpliste. Ils ne pouvaient être qu’étrangers, les Français, les vrais, les bons, sont tous d’honnêtes citoyens qui ne feront jamais rien contre leur pays ou leurs institutions. Du coup quand la droite, qu’elle soit dite extrême ou républicaine, proposait des sanctions envers ce type d’individus, elle ne jurait que par la déchéance de nationalité. Ces gens ne pouvaient pas être Français puisque trop violent et haineux, supprimons leur nationalité française, ils auront toujours leur autre passeport, surement celui de l’état de Barbarie. Sans nationalité française, il sera plus simple de les renvoyer chez eux, en Barbarie.

Le problème est qu’à force de se planter et de découvrir qu’il y avait des Français Français, sans double nationalité barbare, leur schéma de pensée s’est déboussolé. L’UMP, qui n’aime pas rester sans réponse devant l’adversité (on peut leur reconnaitre ça au moins), a fait preuve d’inventivité pour lutter, non pas contre le terrorisme, mais contre les terroristes. Dans un premier temps, qui sont ces terroristes ? Nos services de renseignement, le ministère de l’Intérieur, tous désignent comme premiers suspects les personnes s’engageant pour faire le djihad. Je ne remets pas en cause ce postulat et il est vrai que ceux qui reviendront vivants d’Alep, de Raqqa ou d’autres lieux syriens ou irakiens auront reçu un sacré entrainement aux maniements des armes et aux techniques de guerre et de guérilla. Ils auront surement aussi été bien éduqués selon les préceptes islamistes pour qui le vrai musulman se doit de se battre contre l’occident. Leur retour en France doit donc être synonyme d’alerte et de surveillance par les services adéquats. Sauf si on les empêche de rentrer en France ! Magnifique idée de l’UMP, Valérie Pécresse et Nicolas Sarkozy en tête, interdire d’entrée sur le territoire des ressortissants Français. Ce n’est techniquement pas une déchéance de nationalité, la personne garde son passeport français et peut vivre sans problème comme tout Français autour du monde, sauf chez lui, en France. Petit problème dans leur plan sans faille, il semblerait que l’interdiction de territoire à ses propres ressortissants soit mal vue du côté de la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Ce contretemps ne pose pas de problème à Valérie Pécresse mais espérons que cela en pose aux autres députés ou au Conseil Constitutionnel.

La déchéance de nationalité ne s’applique pas aux Français, l’interdiction du territoire non plus, mais sont-ils au dessus des lois ? Cette dictature laxiste, socialiste et droit-de-l-hommiste va-t-elle laisser impunément les terroristes se promener en toute liberté sans être inquiétés ? NON, parole d’UMP ! Pour cela, ils ont trouvé une nouvelle idée. Celle-ci semble imbattable, elle a été mise en place en 1944 à la Libération. Si ces Français doivent rester Français et peuvent vivre en France, alors rendons les indignes d’être Français ! Pour faire simple, l’indignité nationale a été mise en place pour punir toute personne ayant collaborée durant la Deuxième Guerre Mondiale. Toute personne jugée indigne est punie de la peine de dégradation nationale, c'est-à-dire que cette personne va perdre de nombreux droits (merci wikipedia) :

  • exclusion du droit de vote,
  • inéligibilité,
  • exclusion des fonctions publiques ou semi-publiques,
  • perte du rang dans les forces armées et du droit à porter des décorations,
  • exclusion des fonctions de direction dans les entreprises, les banques, la presse et la radio, de toutes fonctions dans des syndicats et organisations professionnelles, des professions juridiques, de l'enseignement, du journalisme, de l'Institut de France,
  • interdiction de garder ou porter des armes.

Dans toutes ces sanctions, je pense que la seule qui pourrait avoir un peu de sens est l’exclusion des fonctions publiques. Pensez-vous réellement qu’un djihadiste, un ancien djihadiste se dise : « si je rentre en France, je ne pourrais pas diriger une banque, autant rester à Alep » ? Pensez-vous qu’un gamin de 16 ans hésitant à partir faire le djihad ou à lutter contre l’état français va se dire : « si on me prend, je ne pourrais plus voter ou être élu député. Je vais plutôt retourner à mes études pour reprendre un grand organisme de presse. » ?
La mesure d’indignité nationale pouvait avoir un sens au lendemain de la guerre, quand des personnes haut placées ont pu profiter du système pendant et auraient voulu faire comme si de rien été ensuite. Elle n’aura servie qu’à soulager des revanchards à une période historique précise et non comparable à la notre aujourd’hui. Elle n’aura d’ailleurs duré que 7 ans, le temps de l’apaisement.

Je suis choqué que l’on puisse ressortir cette mesure aujourd’hui. A part montrer que l’on est sans réponse face aux problèmes actuels, que notre logique de pensée est bloquée à la moitié du XXème siècle, je ne vois pas ce que peut apporter une telle proposition. Cette réponse n'apporte rien à part vouloir mettre au ban de la société des personnes uniquement soupçonnées, sans le moindre début de preuve accablante. Que des personnes suspectées d'être dangereuses soient surveillées oui, qu'elles soient automatiquement punies non.
Je suis d’autant plus choqué que si cette proposition est régulièrement déterrée par les parlementaires UMP (et soutenu par le FN, comme lors de la séance du 26 novembre 2014), aujourd’hui elle est reprise par Annick Lepetit, porte-parole du groupe socialiste à l’Assemblée Nationale, soumise au débat par Manuel Valls, alors qu’heureusement, François Hollande s’est montré opposé à ce projet. Il ne doit pas y avoir de loi d’exception, souvenons-nous en.

1 commentaire:

  1. Je préconise une solution à la fois simple et peu coûteuse : la bavure policière généralisée et, bien entendu, couverte par les autorités de tutelle.

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