mardi 25 mars 2014

Le FN, non, rien n'a changé

Non, rien n'a changé ce 23 mars au soir. Rien n'avait vraiment changé avant, rien ne changera après non plus d'ailleurs. Le 23 mars 2014, soir de premier tour des élections municipales, certains journalistes parlent de l'abstention comme grand vainqueur de l'élection (comme aux 20 dernières élections), d'autres parlent de la victoire du FN (comme aux 20 dernières élections), voire même de la victoire de Marine Le Pen dans sa quête de « dédiabolisation » du FN.

En vérité, rien n'a changé. La première victoire du FN aux municipales date d'il y a 31 ans. Le clan Stirbois s'alliait au RPR chiraquien de l'époque pour faire front contre le communisme, c'étaient pour les municipales de 1983. Douze ans plus tard, le FN gagnait ses élections municipales. Vitrolles tombait aux mains de la famille Mégret, Orange dans la poche de Jacques Bompard, Marignane était gagnée par Simonpieri et Toulon, quinzième plus grande commune de France, était conquise par Jean-Marie Le Chevalier. En 2002, le FN réussissait son coup d'éclat. Jean-Marie Le Pen accédait au second tour de l'élection présidentielle.

Comment croire que le FN a changé ? Comment croire que le FN s'est dédiabolisé alors qu'il continue lentement mais surement sa progression dans les consciences politiques ? Le scrutin de ce dimanche n'est pas un tournant dans l'histoire du FN, ce jour est à peine une nouvelle marche pour lui. Le FN est un parti faisant parti du paysage politique français, et à ce titre il est normal qu'il réalise dans certaines villes 15 ou 30 %. Il est aussi normal que certaines municipalités succombent aux charmes de ce parti soit disant vierge de tout pouvoir.

Aujourd'hui, comme hier, rien n'a changé. Le FN reste un parti à combattre. Certes il est un parti qui a le droit de citer, comme l'UMP, l'UDI, le Parti Socialiste ou encore le NPA, mouvement trotskiste anti-stalinien. Aujourd'hui et demain encore, je militerai pour que le FN n'arrive pas au pouvoir, tout comme l'UMP ou le NPA. Ensuite il faut savoir faire des concessions et avoir des échelles de valeurs. Le FN, pour son enfermement nationaliste, pour son rejet du voisin mondial, pour sa vision inappropriée de la société et de l'économie restera toujours le parti à combattre en priorité. Juste devant un UMP qui reprend les mêmes discours nauséabonds sur les voisins mondiaux ou sur les Français les moins favorisés. L'UMP, elle même juste devant les centristes plus ou moins humanistes qui veulent en partie faire avancer la société tout en oubliant que la société a besoin de protéger les plus faibles de ses travailleurs (ou personnes voulant travailler). Tout est une question d'échelle et la démocratie française permet d'accueillir tous ces échelons, pour notre plus grande fierté et loin des arguments de « dictatures socialistes » de certains bas du front qui se proclament « républicains ».

Le pire, je le crains, est que demain, rien n'aura changé. Le FN est un parti ancré dans les mœurs électorales des Français depuis 1983 et pourtant tous ses opposants continuent à la pointer du doigt comme un jeune en pleine crise d'adolescence. Le FN, depuis 31 ans, a une politique locale et nationale qui est mauvaise. Sa politique nationale est contraire à tout ce qui a été construit depuis des décennies (peine de mort, solidarité, échanges européens et mondiaux, etc.) et demanderait des révisions d'accords ou de constitution. Sa politique municipale a montré tout ce qu'il ne fallait pas faire pour la gestion d'une ville. Qui se souvient que Vitrolles était une ville où sévissait une des meilleures équipes européenne de handball masculin ? Qu'est devenu la scène culturelle vitrollienne, sa salle nommée le Sous-Marin, ses concerts ? Que sont devenus les associations mettant en place des actions et des activités contraires aux goûts tranchés, réactionnaires et racistes de la municipalité ? Qui se souvient des promesses de M. Simonpierri à Marignanne concernant une stabilité des impôts et un complexe de loisirs (remplacés en cours de mandature par une hausse des impôts et un supermarché) ? Qui se souvient de la croisade de Le Chevallier à Toulon pour la culture provençale et contre tout autre forme de culture ou de la destination frauduleuse des fonds municipaux du service municipale pour la jeunesse ?

Non rien n'a changé. Si le FN est toujours autant présent ce 23 mars 2014, c'est qu'aucune politique nationale mise en place depuis plus de 20 ans n'a permis de contredire les arguments populistes du Front National. Aux yeux de l'électeur du Front National, tout est mis en œuvre pour aider les banlieues urbaines alors que rien n'est fait pour les communes rurales. Il faut avouer que la fermeture de palais de Justice et d'hôpitaux en régions jugés non utiles ou non rentables par la droite entre 2002 et 2012 n'a pas aidé à changer les mentalités.

Non, rien n'a changé, et si on continue à se rythme là, rien ne changera dans les années à venir. Le FN s'implantera de plus en plus dans les bourgades de régions, continuera à augmenter sa visibilité et récoltera de plus en plus de voix aux élections aux enjeux nationaux comme les législatives et les présidentielles. Elections après élections, les représentants de droite et de gauche se succéderont sur les plateaux télé pour accuser les abstentionnistes plutôt que de les convaincre.

François Hollande a été élu pour apaiser les Français après 5 années de tension exacerbées par Nicolas Sarkozy. Mais il a aussi été élu pour redonner espoir à tous les Français, c'est à dire les jeunes (qui voient, eux, leur courbe du chômage diminuer) mais aussi les plus âgés (qui voient la retraite reculer et le chômage avancer) et les étrangers (qui ne votent pas mais qui auraient aimé participer à ces municipales). Si on ne fait rien, si le gouvernement socialiste ou le parti socialiste ne fait rien, alors un boulevard des déçus de la politique s'ouvrira aux candidats du FN. A ce moment là, on pourra de nouveau s'étonner de la soit disante montée du FN. Cette montée n'aura pas été soudaine, elle ne sera que la conséquence de près de 40 ans atermoiements sur un parti dont personne n'aura voulu le combattre réellement.


Ce billet a été écrit et publié pour "l'édito des blogueurs" sur Mediavox.fr 

1 commentaire:

  1. En effet difficile de convaincre les abstentionnistes, les plus nombreux aujourd'hui dans beaucoup de communes, même en faisant du porte à porte...sont convaincus sur le moment et puis oublient le jour j.
    Merci pour ce rappel,historique que tous les médias ne font pas .....pour ne pas dire aucun

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